Chronique : L’heure africaine, un frein au développement

Article : Chronique : L’heure africaine, un frein au développement
Crédit: pixabay
22 décembre 2023

Chronique : L’heure africaine, un frein au développement

L’africain a une autre perception de l’espace et du temps. Respecter l’heure fixée est presqu’une gageure en Afrique noire. Sa gestion du temps est beaucoup plus différente de celle admise par le monde occidental. Par exemple, les Américains ont une main de fer sur le temps. “Time is money”, disent-ils. Vous arrivez à une conférence à 10h04 au lieu de 10h ? Vous êtes en retard. Et même si personne ne vous le dira, ce retard sera interprété d’une manière négative aux États-Unis : manque de respect pour les participants, manque de professionnalisme, manque d’organisation.

Le GMT africain 

Cependant,  pour l’africain, la notion de “chaque chose à son temps” est quasi inexistante. En effet, en Côte d’Ivoire, il y a ce que l’homme de la rue a surnommé « GMT » ou « temps universel » c’est à dire que lorsqu’on donne rendez-vous à 12 heures, sachez bel et bien qu’il s’agit plutôt de 14 heures. Une cérémonie prévue à 16 heures est condamnée à commencer à 18 heures. 

Rarement, les manifestations officielles ou privées, les réunions administratives, associatives ou politiques, les réunions de famille, les rencontres sportives, les spectacles, les rendez-vous mondains ou d’affaires démarrent exactement à l’heure prévue. Quand ce ne sont pas les organisateurs de l’événement qui ne sont pas totalement prêts, ce sont les invités ou participants qui ne sont pas arrivés à temps. Dans tous les cas, le retard est consommé et pas souvent assumé.

Pour se dédouaner, les organisateurs prononcent la formule magique : « Désolés pour ce léger retard, indépendant de notre volonté ! », et la cérémonie peut commencer. De leur côté, les invités ou participants retardataires évoquent mille et une raisons pour justifier l’injustifiable. Au finish, tout le monde est en retard, tout le monde est excusable, ce qui fait que le retard se porte comme un charme sur le continent.

Le retard en Afrique, une question de culture et d’éducation

L’horloge, la montre et les rendez-vous à heure fixe sont apparus en Afrique avec la colonisation et les instruments de mesure du temps sont entrés dans l’usage des ménages et la vie sociale de la majorité des Africains, il y a juste un siècle.

Jadis, il y avait aussi des rendez-vous, mais le repère horaire est souvent relatif, dans le genre : le premier chant du coq, le lever du soleil, dans la matinée, au moment du déjeuner, dans l’après-midi, au coucher du soleil, à la tombée de la nuit, etc. 

Comme on le voit, c’est un système assez approximatif, car aucun de ces repères n’est ponctuel. Dans ces conditions il est presqu’impossible d’établir un timing quelconque. Tel, fut pendant des siècles, le comportement des Africains face aux rendez-vous. 

Avec la pénétration européenne et l’aventure coloniale, l’horloge fait son apparition sur le continent et il a fallu que les Africains s’adaptent à ce nouvel outil d’appréciation du temps. Mais, dans ce nouveau contexte, le temps est fixé de façon très précise et la ponctualité devient une valeur nouvelle qui fait son apparition sur le continent. L’heure avant l’heure n’est pas l’heure, l’heure après l’heure, n’est pas l’heure, l’heure, c’est l’heure. Les Africains vont s’employer pendant environ un siècle à s’adapter à cette nouvelle donne avec plus ou moins de bonheur.

Seulement voilà, après environ cent ans d’adaptation, le retard est un défaut qu’une large majorité d’Africains ont encore en partage. Très léger ou très prononcé selon le cas, le retard colle malheureusement trop souvent à l’image des Africains dans leurs relations publiques et motive quelque peu les critiques de décontraction, d’absence de rigueur et de négligence souvent formulées contre eux. Les gens attendent la dernière minute avant de manifester leur empressement à être à l’heure, ce qui fait que le retard est consommé malgré l’empressement qu’on peut observer.

De la déconstruction du retard

Pour autant, le retard n’est pas un héritage génétique, il est plutôt culturel et peut se corriger ou se déconstruire dès que la société de façon déterminée va accentuer la pression de sélection sur ce critère pour que les choses changent rapidement. Seule l’éducation peut contribuer à le corriger afin que le temps devienne de l’argent au service du développement. Ceci revient à faire de la ponctualité une valeur cardinale de nos cultures et de sensibiliser toutes les couches de la société, notamment, les élèves, dès les classes élémentaires afin de créer un nouveau patron comportemental qui finira par bannir le retard sur le continent.

Lama

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